Analyse des Caractères de La Bruyère, Arrias

Analyse des Caractères de La Bruyère, Arrias

Comment La Bruyère fait-il d’Arrias un contre-modèle de l’honnête homme et à travers lui, le contre-modèle d’une société qui préfère l’artifice à la vérité ?

 

Au XVIIème siècle, un honnête homme c’est un homme d’honneur, mais ici le champ lexical de la tromperie et du mensonge domine : “persuader” “pour tel” “mentir” “paraître”.

Un honnête homme au XVIIème siècle c’est un homme mesuré qui maîtrise ses émotions, qui reste digne mais Arrias, lui, a un caractère théâtral, il se met en scène avec de nombreuses hyperboles : “homme universel”, figure d’exagération (contraire de la litote (dire le moins pour exprimer le plus par exemple “Va je ne te hais point” signifie : pars ! parce que je t’aime à la folie et je vais bientôt faire des bêtises)).

Ce portrait est construit par l’action car La Bruyère ne donne pas de description physique d’Arrias mais donne plutôt une description du comportement déplacé d’Arrias. 

Il monopolise la conversation grâce à la répétition de “il” et “je” tout au long du texte. Cependant, au XVIIème siècle la discussion est un art véritable qui donne lieu à des démonstrations argumentatives, mais Arrias est pédant, prétentieux, ce qui est souligné par les allitérations en [p] comme s’il postillonnait en parlant : “Quelqu’un se hasarde de le contredire, et lui prouve nettement qu’il dit des choses qui ne sont pas vraies”; et c’est un imposteur “persuader” “pour tel” “paraître” “parle”.

Il fait des répétitions qui montrent qu’au final il n’a rien d’intéressant à dire.

Il se félicite lui-même : “il les trouve plaisantes, et il en rit le premier jusqu’à éclater” Alors que l’honnête-homme, lui, fait preuve d’humilité bien qu’il soit paré de toutes les qualités morales : “il discourt des mœurs de cette cour”.

Arrias veut dominer la conversation à cause de la répétition des “je” et des “il” alors que normalement ce devrait être un échange d’idées mesurées : “Arrias ne se trouble point, prend feu au contraire contre l’interrupteur”.

Arrias utilise des subterfuges pour faire croire que ses sources sont fiables : comme s’il avait voyagé et mené de vraies enquêtes : “Il reprenait le fil de sa narration avec plus de confiance qu’il ne l’avait commencée”.

Mais à la fin il y a un retournement de situation : “C’est Sethon à qui vous parlez, lui-même, et qui arrive fraîchement de son ambassade.” On peut même parler de coup de théâtre puisqu’il s’est lui-même donné en spectacle du fait qu’il se met toujours en avant et qu’en fait il s’adresse à Sethon lui-même, celui dont il disait tenir ses informations.

L’humiliation d’Arrias est totale puisqu’on met à jour sa supercherie : “C’est Sethon à qui vous parlez, lui-même, et qui arrive fraîchement de son ambassade.” Il est complètement déshonoré et ne pourra pas rester à la cour.

A travers cet anti-portrait de l’honnête-homme, La Bruyère critique la cour de Versailles qu’il présente comme un théâtre dans lequel les courtisans hypocrites jouent un rôle et se vantent pour évincer les autres.

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