Analyse de l'article Autorité politique de Diderot dans l'Encyclopédie

Analyse de l'article Autorité politique de Diderot dans l'Encyclopédie

Texte argumentatif qui énonce une idée très nette, peu à peu construite :

IDEE = C'est au peuple que l'autorité appartient fondamentalement.

L'explication sera donc LINEAIRE et insistera sur l'ARGUMENTATION 

 

Première partie = Recherche des origines de l'autorité. 

1. Double formulation avec postulats (négatif - affirmatif et chiasme) 

Une REFUTATION débute l'ARGUMENTATION :

aucun n'a reçu le droit de commander aux autres (périphrase pour autorité) 

Une AFFIRMATION ensuite : Liberté = don divin

la liberté est un présent du Ciel et chaque individu a le droit d'en jouir 

Remarquer le système d'opposition (n'a reçu/ est un présent - aucun homme/chaque individu - le droit de commander/le droit d'en jouir) 

IDEE = La source de l'autorité ne peut donc être naturelle, il faut la chercher ailleurs 

 

2. MAIS deux restrictions ensuite (élimination d'objections éventuelles): 

Liberté indissociablement liée à la POSSESSION de la RAISON 

Existence d'une puissance paternelle : glissement rapide d'autorité à puissance qui souligne la nature nécessaire, mais transitoire de ce pouvoir 

Rapide et PEREMPTOIRE conclusion :

(toute autre - toujours - qu'on examine bien + alternative suivante qui ne laisse aucune place à un autre raisonnement.)

=> Il faut chercher ces sources dans l'homme et son évolution. 

 

3. Les deux seules origines de l'autorité : (présentation de la démarche) 

autorité de fait : fondé sur la "loi" du plus fort, de la force d'un seul. 

autorité de droit : fondé sur le consentement de tous, un contrat tacite ou passé réellement entre gouvernants et gouvernés. 

Cette ALTERNATIVE est ensuite développée dans les paragraphes suivants. 

 

Deuxième partie (développement) = 3 § bien nets 

2 § à rapprocher, à opposer, grâce à l'anaphore de "La puissance"

1 § au milieu qui sert de transition 

1. Dénonciation de la première autorité : le thème de l'USURPATION

Connotation très péjorative des termes : 

négations restrictives (n'est qu'une usurpation, ne dure qu'autant), joug, usurpation, reprise de fort ou force 

Abus volontaire des termes de droit et de loi, car cette autorité n'est qu'un rapport sans contrat de réciprocité: forte antithèse commander/obéir 

Ce rapport est surtout celui de l'instabilité :

insistance sur le temps : ne dure autant que, deviennent à leur tour, secouent, antithèse fait // défait 

La seule notion légitime en fait dans cette situation est celle de L'INSURRECTION

Passage possible de la première à la seconde : la fin du despotisme.

N'est-ce pas en fait la situation exacte de la France : contrat tacite ? 

 

2. Avantages d'une autorité construite, raisonnable : thème de la LEGITIMITE 

Existence de conditions nécessaires, de limites acceptées, de clauses du contrat: fixent et restreignent. 

Les termes sont maintenant laudatifs en gradation : usage ( =(continuité), utile (+ société), avantageux(+ république) 

Troisième partie : de l'utilité de Dieu ! 

Problème à examiner : véritable foi ou utilisation argumentative ?

Le CAR indique qu'il s'agit d'un argument fort utile, qui peut aussi servir de protection contre la censure.

Diderot UTILISE en fait deux visages de Dieu , un Dieu antique biblique qui possède un pouvoir absolu sur la créature, jaloux de tout autre autorité, vengeur de ceux qui se livrent à l'idolâtrie.

condamnation donc de la théorie du droit divin :

Dieu ne pourrait supporter l'existence d'un délégué, d'un maître absolu sur terre, que les hommes vénéreraient 

un Dieu fort utile, celui d'un philosophe, plein de générosité (?), qui est plutôt un ETRE RAISONNABLE

Fausse antithèse (les deux membres ont en fait le même sens) entre : par raison et avec mesure = non pas aveuglément et sans réserve 

L'intérêt de cet argument qui peut paraître artificiel : 

Nul monarque ne peut se considérer comme dépositaire de l'autorité divine. 

Le monarque est ravalé au rang de simple "un autre homme" "l'un d'eux" 

L'idolâtrie est en fait un retour à la première autorité, celle du plus fort 

Artifice suprême : cette argumentation est prêtée à Dieu en personne. 

Quatrième partie : le CONTRAT 

"d'ailleurs" prolonge le développement, introduit la notion FONDAMENTALE et REVOLUTIONNAIRE de SOUVERAINETE DU PEUPLE. 

L'autorité appartient au peuple et cette possession est inaliénable.

Tout le § utilise la METAPHORE FILEE DU CONTRAT NOTARIAL assimilant l'exercice du pouvoir à un bien matériel et usant de très nombreux termes juridiques.

Antithèse révolutionnaire entre : 

le bien collectif et éternel 

l'exercice personnel, éphémère,(simple délégation momentanée) 

Aboutissement de la réflexion : (RETOURNEMENT) 

Ce qui était conçu comme une concession exclusive et arbitraire de Dieu (c'est-à-dire la monarchie) devient en fait une manifestation d'un pouvoir démocratique qui peut être remis en question puisque la souveraineté appartient â la nation en corps, à l'ensemble des citoyens. 

La monarchie n'est donc qu'une manifestation historique, elle n'est pas le seul pouvoir possible. 

 

Conclusion 

Texte d'une grande audace. Diderot désacralise la monarchie, préfigure dans cet article sa disparition.

Aussi comprend-on mieux que dès 1752, les directeurs de l'Encyclopédie soient en butte aux poursuites du collège des Censeurs royaux.

Avant la Révolution Française, Jefferson, dans la Déclaration d'Indépendance des E-U (1776) mettra en pratique les grandes idées de Diderot.


Écrire commentaire

Commentaires: 0