L'Etat et la liberté sont-ils contradictoires ?

L'Etat et la liberté sont-ils contradictoires ?

Platon montre que ni la démocratie, ni l’oligarchie, ni l’aristocratie, ni la tyrannie n’incarnent la sécurité et la liberté, même si la démocratie s’en rapproche. En effet, la démocratie incarne la dictature de l’opinion publique manipulée par les démagogues ; elle engendre la corruption, et parfois la tyrannie, c’est un régime instable. La démocratie contemporaine voit la généralisation de l’esprit corporatif. Selon Tocqueville « on se déleste de tout effort individuel et de tout sacrifice, l’Etat est perçu et désiré comme un pouvoir immense et tutélaire qui veille sur l’existence du citoyen », comme une puissance paternelle. « Que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de la pensée et la peine de vivre ? » (De la démocratie en Amérique). Si l’opinion publique gouverne sans volonté de s’élever à une raison universelle, alors la démocratie peut engendrer la tyrannie. Il y a donc un écart entre l’idéal de la démocratie et la réalité historique du régime démocratique.

Pour Nietzsche « l’Etat c’est le plus froid des monstres froids », car l’Etat au nom de la raison d’Etat se retourne toujours contre la liberté individuelle. Marx affirme qu’ « aucun des droits de l’homme ne dépasse l’homme égoïste ». Et Bakounine ajoute : « Même l’Etat le plus démocratique a un pouvoir politique qui détruit ce qu’il est censé représenter. Il faudrait supposer chez ses représentants une intelligence omnisciente, omniprésente, pour régler tous les problèmes locaux. »

Pour autant, une société sans Etat est-elle souhaitable ? Sans lois, il serait impossible de garantir la liberté. Le libéralisme outrancier demande la suppression de la tutelle de l’Etat, mais est-ce un progrès ? A l’inverse, lorsqu’on se penche sur le modèle soviétique on constate comme le dit Raymond Aron que « ce n’est pas le socialisme qui a changé le pouvoir autoritaire de l’Etat mais c’est le pouvoir d’Etat qui a changé le socialisme ». Ainsi, au lieu de vouloir changer l’Etat, ne vaudrait-il pas mieux améliorer l’état de l’Etat ? La démocratie est à construire, ce n’est pas un fait mais une valeur dont le contenu est historique. La démocratie pose le problème du devenir de l’homme : la revendication d’un idéal de démocratie est le seul sens que l’on peut donner au combat politique, sans quoi celui-ci se réduit à une lutte pour le pouvoir.

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