Les différents rôles de la conscience

Les différents rôles de la conscience

Pour Descartes la conscience est la condition de toute connaissance vraie. Ce qui caractérise la conscience humaine c’est la conscience de soi : le cogito cartésien. La conscience de soi n’est pas le sentiment de soi (il peut être une source d’illusion : je peux m’estimer courageux alors que je ne le suis pas, je peux estimer que je suis généreux alors que ce n’est que de l’amour propre). Ce qui caractérise la conscience de soi pour Descartes c’est le fait que le sujet peut se décentrer par rapport à tout ce qui constitue sa vie subjective  (les sentiments, les croyances, les pensées, les souvenirs, les volontés, les désirs), l’individu devient un sujet autonome lorsqu’il est capable de penser ses pensées ou encore lorsqu’il est capable de douter, c’est-à-dire d’examiner le bien fondé de ses opinions (leurs causes, leurs conséquences). Il en va ainsi de la pensée scientifique qui est logique et qui doit être le modèle de toute pensée philosophique. L’acte de penser n’est jamais établi une fois pour toutes : on ne se repose pas sur ce qu’on a pensé la veille car penser est une volonté, un effort, et il y a deux manières d’être chez l’homme : soit on se repose sur ce qu’on a pensé hier, soit on se conduit soi-même, on se décide soi-même, et c’est cela la pensée : une vigilance constante par rapport à tout ce que l’on croit et à tout ce que l’on affirme.

Non seulement la conscience est le fondement assuré de toute connaissance véritable, mais elle est également ce qui m’ouvre aux autres et à moi-même. Husserl écrit « l’essence de la conscience est de porter sur autre chose que soi » dans Cinq méditations cartésiennes. Ce qui caractérise la conscience humaine c’est ce qu’il appelle une intentionnalité ou encore une visée. La conscience se rapporte toujours à autre chose qu’elle-même, dès qu’il y a conscience c’est qu’il y a objet pour la conscience : la conscience n’est pas une chose parmi les choses, dès qu’il y a conscience il y a un monde pour la conscience. Par exemple la conscience spontanée correspond à la perception ; tandis que la conscience réfléchie porte ma conscience en dehors d’elle-même, par exemple lorsque j’ai conscience des conséquences d’une grève à la SNCF je me rapporte à un événement social. Quand je pense à moi-même c’est comme si je pensais à un autre. En conséquence Husserl dit : « L’intersubjectivité fonde la subjectivité », ou encore le sujet ne peut accéder à ses propres états de conscience (ses pensées, ses sentiments) en dehors du monde d’autrui. Sartre illustre ce concept dans L’être et le néant par deux exemples. Le premier est celui du jardin public du Luxembourg : « Autrui n’est jamais perçu comme un objet  mais comme une présence qui modifie le rapport qu’entretient la conscience avec elle-même ». Le deuxième exemple est celui de la honte qui est éprouvée « lorsque je reconnais que je suis comme autrui me voit », la honte est un sentiment de reconnaissance. Je ne peux donc avoir accès à mes états de conscience en dehors du monde d’autrui. Husserl dit : « Autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même ».

Il ne faut pas confondre conscience et connaissance. Etre conscient est nécessaire pour établir une pensée véritable, ce qui témoigne d’une ouverture aux autres et à soi-même. Mais la science intellectuelle ne suffit pas, il faut également avoir une conscience morale : essayer de lutter contre la mauvaise foi qui est un double mensonge aux autres et à soi-même (Sartre), essayer de réfléchir sur des valeurs comme la tolérance qui n’est pas nécessairement une vertu : tolérer l’intolérable est une lâcheté, aussi Vladimir Jankelevitch dit qu’on ne peut pas dissocier la conscience de la conscience morale, simplement remarquer qu’il n’y a pas de conscience morale sans réflexion sur la morale.

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