Analyse de Zadig de Voltaire

Analyse de Zadig de Voltaire

Analyse du Chapitre 3 Le chien de la reine, De « Un jour, se promenant auprès d’un petit bois » à « et leurs valets demandèrent des honoraires » Comment Voltaire fait-il ici une satire de la justice ?

I) La structure du conte

Dans ce conte philosophique, Voltaire reproduit le contexte et le style des contes orientaux, très à la mode au XVIIIème siècle. Le champ lexical de l’orientalisme est omniprésent : «  eunuque », « Babylone ». Il est associé aux champs lexicaux de la grandeur et de la richesse puisque l’empire ottoman représente l’une des plus grandes puissances de l’époque et fait rêver les français tout en les effrayant.

Le héros passe par plusieurs péripéties. En homme des lumières, Zadig reste toujours calme et fait preuve d’une grande perspicacité qui lui vaut malgré tout d’être condamné « au knout, et à passer le reste de ses jours en Sibérie ».

 

II) La satire de la justice

Les orientaux sont présentés comme des barbares cruels qui jugent sur les apparences. Zadig mène une véritable enquête à partir des indices laissés par la chienne et le cheval : « j’ai remarqué que le sable était toujours moins creusé par une patte que par les trois autres, j’ai compris que la chienne de notre auguste reine était un peu boiteuse ». Mais son raisonnement est trop fin pour être compris par les orientaux qui le prennent pour un menteur et un voleur. Cet épisode est représentatif des difficultés auxquelles sont confrontés les philosophes des lumières dans une société qui refuse d’être éclairée. De plus, Voltaire ironise sur le fait que la justice reste injuste et corrompue jusqu’au bout puisqu’après avoir été forcés de reconnaître leur erreur et de rembourser Zadig, les officiers de justice qui « vinrent chez lui en grand appareil lui rapporter ses quatre cents onces ; ils en retinrent seulement trois cent quatre-vingt-dix-huit pour les frais de justice, et leurs valets demandèrent des honoraires ». Bien qu’il ait raison, Zadig se fait donc dépouiller d’une grosse somme d’argent.

Analyse du Chapitre 6 La justice, De «Le roi avait perdu son premier ministre» à «c’est vous qui aimez le mieux votre père» Quelle image de Zadig ce récit donne-t-il ?

I) Le portrait de Zadig

Ce texte est un apologue car il se situe en orient, à Babylone (“Toutes les belles dames de Babylone applaudirent à ce choix”). De plus la situation est invraisemblable puisque Zadig est choisi comme premier ministre alors que ce n'est encore qu’un jeune homme et il éprouve de la gratitude pour tout le monde, ce que Voltaire traduit avec ironie (“Zadig ayant remercié le roi et la reine, alla remercier aussi le perroquet”). Zadig est présenté uniquement par son caractère, Voltaire fait un portrait moral de ce personnage, mais pas de portrait physique : “ il se mit à exercer son ministère de son mieux”. Le lecteur ne connaît aucune caractéristique physique de Zadig car seules importent les valeurs morales qu’il transmet. Le narrateur parle de Zadig élogieusement. C’est un personnage humble et discret, un véritable philosophe des Lumières : “ne fit sentir à personne le poids de sa dignité”. Ensuite nous pouvons remarquer que Zadig s'efforce d’être juste dans les affaires qu'on lui confie : “Quand il jugeait une affaire, ce n’était pas lui qui jugeait, c’était la loi ; mais quand elle était trop sévère, il la tempérait”. 

 

II) Une justice exemplaire comme celle du roi Salomon

Lorsque le problème de l'héritage d'un “fameux négociant” apparaît, c'est lui que l’on charge de rendre la justice. Il fait alors preuve de calme pour résoudre l’affaire : “Zadig les fit venir tous deux l’un après l’autre”.

Zadig juge les deux frères par rapport à leur façon d'utiliser leur argent. Le premier frère est déçu que son père soit en vie car il a payé “un tombeau qui m’a coûté bien cher !”. Tandis que l'autre frère veut rendre à son père son héritage, excepté la part qu'il a déjà donnée à sa sœur. Le premier frère est ainsi attaché à l'argent, au contraire du second qui est attaché à sa famille. Zadig s'appuie sur leurs réactions émotionnelles suite à l'annonce de la guérison du père. Le jugement de Zadig paraît juste parce qu'il met en avant les valeurs profondes des deux personnages, puisque le premier frère n’espérait pas la guérison de son père (il lui a construit un tombeau) tandis que le deuxième frère voulait soulager son père en prenant en charge financièrement sa soeur. En cela il se positionne en successeur voire en père de substitution, responsable de la famille. 

Dans cet extrait, le personnage de Zadig est décrit à travers son comportement. Il exerce son métier de ministre en s'appuyant sur des valeurs profondes des personnages et non sur les apparences comme les autres villageois : “chacun disait : « C’est l’aîné qui aime le mieux son père”. 

Analyse du Chapitre 11 Le bûcher, De «Il y avait alors dans l'Arabie une coutume affreuse» à « Il était donc le bienfaiteur de l'Arabie.» Comment Zadig parvient-il à changer une coutume barbare ?

I) Une coutume barbare

En Arabie, les femmes étaient soumises à une horrible coutume : “Il y avait alors dans l'Arabie une coutume affreuse” qui les entraînait à une mort longue et douloureuse : “ Lorsqu'un homme marié était mort et que sa femme bien-aimée voulait être sainte, elle se brûlait en public sur le corps de son mari.” Les femmes étaient mariées à des hommes plus agés qu’elles et il était prévisible que les hommes mouraient avant elles. Les femmes se devaient de respecter la coutume car toutes les femmes respectaient la tradition et il était inimaginable d’enfreindre celle-ci. : “ je serais perdue de réputation, et tout le monde se moquerait de moi, si je ne me brûlais pas.” Cela était très bien vu au sein de leur tribu et les femmes étaient même considérées comme “saintes” si elles suivaient la coutume. : “c'était une fête solennelle qui s'appelait le bûcher du veuvage. La tribu dans laquelle il y avait eu le plus de femmes brûlées était la plus considérée.” De plus, la coutume était pratiquée depuis des siècles et cela était très mal vu de ne pas la respecter : “Qui de nous osera changer une loi que le temps a consacrée? Y a-t-il rien de plus respectable qu'un ancien abus?” De plus, le champ lexical de l’horreur renforce l’idée de barbarie, “affreuse”, “horrible”. Les femmes s'estiment alors contraintes de suivre cette coutume et de se laisser mourir sous peine d’être bannies de leur tribu.

 

II) La critique du fanatisme

Les femmes et les hommes de la tribu respectent la coutume et n’imaginent pas l’enfreindre un jour. Les femmes, ne réfléchissent pas et suivent bêtement une coutume qui leur coûte la vie seulement pour suivre le modèle d’idéal de leur tribu. “je serais perdue de réputation, et tout le monde se moquerait de moi, si je ne me brûlais pas.” De plus, la mort des femmes est l’occasion de festoyer : “C'était une fête solennelle qui s'appelait le bûcher du veuvage.” elles admirent la coutume et en perdent leur raison. “Vous aimiez donc prodigieusement votre mari? lui dit-il. - Moi? Point du tout, répondit la dame arabe. C'était un brutal, un jaloux, un homme insupportable; mais je suis fermement résolue de me jeter sur son bûcher.” Les femmes ne le font même pas par amour de leur mari mais seulement pour avoir une bonne image au sein de leur tribu, une réputation qui ne peut leur servir étant donné qu’elles se tuent pour l’obtenir. De plus, il est inimaginable de la changer puisqu’elle existe depuis des siècles. : “Il y a plus de mille ans que les femmes sont en possession de se brûler. Qui de nous osera changer une loi que le temps a consacrée? Y a-t-il rien de plus respectable qu'un ancien abus?” De plus, Voltaire utilise l’ironie pour dénoncer le fanatisme de la tribu : “La tribu dans laquelle il y avait eu le plus de femmes brûlées était la plus considérée.” Les hommes et femmes de la tribu trouvent alors la coutume banale et pensent que le crime est tout à fait normal.

 

III) Zadig, un homme des Lumières

Zadig trouve la coutume barbare et inacceptable : “Zadig remontra à Sétoc combien cette horrible coutume était contraire au bien du genre humain”. Il  décide de raisonner les hommes et essaye donc de les convaincre par la parole : “Qui de nous osera changer une loi que le temps a consacrée? Y a-t-il rien de plus respectable qu'un ancien abus? - La raison est plus ancienne, reprit Zadig.” Quant aux femmes, jugées plus émotionnelles que raisonnables, Zadig veut les persuader en touchant leurs émotions. Zadig fait de nombreux compliments à la jeune veuve : “et, après s'être insinué dans son esprit par des louanges sur sa beauté, après lui avoir dit combien c'était dommage de mettre au feu tant de charmes, il la loua encore sur sa confiance et sur son courage.” De plus, le dialogue entre les deux personnages peut même s’apparenter à une scène de séduction : “Que feriez-vous enfin, lui dit-il, si la vanité de vous brûler ne vous tenait pas?Hélas! dit la dame, je crois que je vous prierais de m'épouser.” Il réussit alors à raisonner la femme et par conséquent, change la vision de la tribu entière.  Zadig se bat pour une cause qui ne le concerne pas directement, et veut seulement le bien-être de chacun.: “ Depuis ce temps, aucune dame ne se brûla en Arabie. On eut au seul Zadig l'obligation d'avoir détruit en un jour une coutume si cruelle, qui durait depuis tant de siècles. Il était donc le bienfaiteur de l'Arabie.” Ainsi Zadig est le porte voix de Voltaire et se positionne en philosophe des lumières.

Analyse du Chapitre 12 Le Souper, De «  Vous êtes de grands ignorants tous tant que vous êtes ! » à «  Tout le monde l’embrassa » Comment Voltaire met-il en scène les conflits religieux de son temps ?

I) Un échange tendu

Le fait que le Grec parle au discours direct accentue la violence de ses propos : «  Vous êtes de grands ignorants tous tant que vous êtes ! » Les réponses s’enchaînent rapidement car tous les convives sont agressifs et veulent monopoliser la parole. Zadig modifie l’atmosphère de ce repas en apaisant les tensions car il réussit à démontrer que tous les convives ont des raisonnements similaires et que malgré les apparences ils sont tous d’accord sur le fond de leur pensée : « Vous êtes donc tous de même avis, répliqua Zadig, et il n’y a pas de quoi se quereller ».

 

II) Une critique de la religion

Les convives se disputent sur des détails religieux alors qu’ils partagent tous un sentiment de foi dans un dieu unique. Leurs propos sont caricaturaux et basés sur des superstitions. La dispute semble aboutir à l’intolérance et au fanatisme mais Zadig parvient à calmer leur réaction passionnelle et impulsive en leur démontrant la futilité des coutumes : « N’est-il pas vrai, dit-il au Celte, que vous n’adorez pas ce gui, mais celui qui a fait le gui et le chêne ? » Ainsi Zadig leur fait comprendre que la religion et la foi sont des choses bien distinctes puisque la religion est créée par des hommes pour en contrôler d’autres, tandis que la foi est la relation personnelle qu’un individu entretient dans l’intimité avec le dieu auquel il croit.

Chapitre 18 Le Basilic, De « Cependant Zadig parla ainsi à Ogul » à « On se tire toujours d’affaire dans ce monde » Comment Voltaire fait-il ici une satire amusante de la médecine ?

I) La santé, une question de bon sens

Voltaire utilise l’ironie pour souligner l’inutilité de la médecine de son temps que le simple bon sens peut supplanter. Zadig remplace les médicaments fantaisistes des médecins d’Ogul par la pratique d’une activité physique et sportive. En jouant au ballon, le patient améliore sa santé et son moral puisque le traitement est amusant : « En huit jours, il retrouva toute la force, la santé, la légèreté et la gaieté de ses plus brillantes années ».

 

II) L’obscurantisme des médecins

Zadig suscite de la méfiance après avoir soigné Ogul car avec son simple bon sens il a démontré que les médecins étaient des charlatans. Ceux-ci veulent donc l’éliminer : « Le premier médecin d’Ogul, sentant combien cet homme était dangereux pour la médecine, s’unit avec l’apothicaire du corps pour envoyer Zadig chercher des basilics dans l’autre monde ». Zadig, en homme des lumières qui se bat contre l’obscurantisme, est « toujours puni pour avoir bien fait ».

Chapitre 19 Les énigmes, De « Illustres seigneurs » à « la douceur de voir son amant digne aux yeux de l’univers d’être son époux » En quoi cette fin de conte philosophique est-elle épique ?

I) Un combat inégal

Voltaire fait preuve d’humour dans ce passage qui parodie un combat épique. En effet, Itobad croit qu’il va dominer Zadig parce qu’il porte son armure et que Zadig est « un champion en bonnet de nuit et en robe de chambre ». Itobad est présenté comme un personnage fourbe et lâche, ce qui, par contraste, valorise le courage et l’honneur de Zadig.

 

II) L’enjeu du combat

Zadig se bat par amour pour Astarté qu’il veut épouser. Le combat épique qu’il mène contre Itobad s’apparente à un tournoi de chevalerie pour gagner les faveurs d’une dame. Les pièces de l’armure sont détaillées une à une comme c’est l’usage dans les chansons de geste. Zadig remporte le combat parce qu’il est valeureux, intelligent, et surtout parce qu’il a raison et que donc il a la justice divine pour lui.

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