Analyse du poème "Les fusillés de Châteaubriant" de René Guy Cadou

Analyse du poème "Les fusillés de Châteaubriant" de René Guy Cadou

Introduction

 

René Guy Cadou, poète influencé par le surréalisme mais caractérisé par sa simplicité, aborde dans son œuvre "Les fusillés de Châteaubriant" un thème poignant : la répression brutale des résistants par les forces allemandes durant la Seconde Guerre mondiale. Ce poème, structuré en deux strophes - un quintil suivi d'une strophe de vingt vers en vers libres - illustre le moment précédant l'exécution des condamnés, qui se remémorent les moments heureux de leur existence. L'originalité de la structure poétique reflète l'intention de Cadou de se démarquer tout en rendant hommage à ces victimes.

 

I. Évocation de l'exécution ou reconstitution de l'exécution

 

Le poème emploie la répétition du pronom "ils" pour évoquer les fusillés, qui restent anonymes, désignés simplement comme "une trentaine". Cette anonymisation souligne le caractère collectif et universel de leur sort. L'expression "ils sont appuyés contre le ciel" symbolise la proximité de la mort, suggérant un passage imminent vers un autre monde. Cette posture crée une image de fraternité et de solidarité face à la mort, renforcée par le futur ("ils ne se quitteront jamais plus"), évoquant une certitude tragique et éternelle. Cadou, à travers ces images, rend hommage à tous ceux qui ont été exécutés pour leurs convictions, se faisant leur porte-parole.

 

Le passage de la vie à la mort est abordé avec finesse : "toute la vie derrière eux" est une périphrase éloquente, et le terme "partir" est employé comme un euphémisme de "mourir". L'enjambement des vers 13 et 14 souligne la fatalité de leur sort, et l'utilisation du futur proche ("vont les tuer") intensifie la sensation d'imminence de la mort. Le poète exprime une indignation face à cette fin imposée, plutôt que la peur de la mort elle-même.

 

II. Présence de la vie

 

Le vers 4 met en lumière le concept de fraternité ("épaule"), évoquant le soutien et l'amour partagé entre les êtres. Cette évocation de l'épaule, chargée de valeur symbolique, souligne la vivacité et l'humanité des condamnés. Leur monde est décrit comme simple et réel, marqué par l'ironie tragique de leur "rendez-vous" avec la mort. Le paradoxe de la vie au sein d'un poème sur la mort réside dans l'absence de lyrisme individuel, remplacé par un sentiment collectif fort.

 

III. Un poème engagé

 

Le poème confère aux condamnés une forme de supériorité morale à travers leur mort (vers 13), montrant qu'ils meurent pour leurs idées (vers 15). Le chant de la liberté, évoqué vers 19, devient un symbole de leur combat, perpétuant ainsi leur mémoire. Les valeurs de liberté, solidarité, fraternité et égalité sont au cœur de ce texte, qui se fait l'écho de la lutte des résistants.

 

Conclusion

 

René Guy Cadou, par ce poème, transmet des valeurs humanistes essentielles. La représentation de la mort des martyrs souligne leur grandeur d'âme, leur combat pour la liberté et la reconnaissance de leurs idées d'égalité. Ce faisant, le poète préserve la mémoire de ces innocents, fusillés pour avoir défendu leurs convictions.

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